Jacques Huet
Réveil de la conscience par la solitude (1982)
Béton
Programme d’intégration des arts à l’architecture du gouvernement du Québec
Emplacement : édicule nord-est
Dans cette œuvre de béton, des personnages solitaires recherchent leur entité. Un cheminement dans la solitude pour retrouver le véritable visage enfoui sous le masque de l’automate.
Le saviez-vous?
Les moules de styromousse ayant servi à réaliser la murale ont été créés à l’ancienne usine de la firme Cadbury, sur l’avenue De Lorimier.
À propos de l’artiste
Né à Montréal, l’artiste autodidacte Jacques Huet (1932-2009) a d’abord sculpté le bois, médium vivant qui l’inspirait particulièrement. Il a ensuite exploité l’aluminium, le bronze, le plexiglas, l’acier, le béton et le granit, matériaux qu’il a su rendre aussi vivants.
Source : page Info STM du 8 juillet 2003
Sculpteur autodidacte né à Montréal en 1932, Jacques Huet a réalisé en 1982 une murale en béton intégrée à l’accès nord de la station de métro Henri-Bourassa. Ce que la plupart des voyageurs du métro ignorent, toutefois, c’est qu’il existe à l’arrière une autre murale quasiment identique, intégrée à l’édifice administratif érigé en même temps que l’accès au métro. «J’ai suivi le principe du positif et du négatif: ce qui est en retrait du côté du métro est en saillie de l’autre côté, et vice versa. De plus, on retrouve du côté de l’édifice gouvernemental une sculpture modulaire qui sert de point de départ à l’œuvre», explique l’artiste. Intégrées à un édifice appartenant au gouvernement du Québec, les murales de Jacques Huet ont été réalisées dans le cadre de la politique du un pour cent qui stipule qu’un pour cent du coût de chaque édifice gouvernemental doit servir à la réalisation d’une œuvre d’art.
On pourrait penser que cette politique a également été employée par les responsables du métro de Montréal, mais ce n’est pas tout à fait le cas: les artistes du métro étaient directement choisis par les architectes, contrairement aux artistes du un pour cent qui sont désignés par un jury. «Lorsqu’un projet est annoncé, n’importe quel artiste peut participer au concours à condition de faire partie de la banque d’artistes du gouvernement. Pour ce faire, il doit envoyer son dossier à Québec et à Montréal, soit un curriculum vitae et vingt diapositives d’œuvres déjà réalisées. Les responsables du projet étudient alors les dossiers et choisissent cinq artistes qui correspondent selon eux à l’effet recherché. Ces artistes sont convoqués, on leur explique les détails du projet (lieu, dimensions de l’œuvre, coût, etc.) et ils doivent préparer une maquette. C’est de cette façon que j’ai été choisi pour réaliser les murales de la station Henri-Bourassa. J’aurais aimé réaliser d’autres œuvres dans le métro, mais puisque cela échappait à la politique du un pour cent, je ne savais pas trop à qui m’adresser...»
Coulées dans le béton
On attend généralement la fin des travaux avant d’installer une œuvre d’art dans un édifice public. Dans le cas de la station Henri-Bourassa, c’est l’inverse qui s’est produit. «Les murales sont en fait des murs coupe-feu qui séparent le bâtiment gouvernemental de la sortie de la station de métro. Il fallait absolument les mettre en place avant de pouvoir construire les étages au-dessus, ce qui a rendu mon travail plus complexe. Il n’y avait pas de temps à perdre: quand on travaille avec un entrepreneur, il ne faut pas le retarder sinon il y a une pénalité à payer. Des réunions de chantier avaient lieu à chaque semaine et tout le travail était synchronisé. Ce fut difficile, mais au moins j’ai l’assurance que mes murales sont là pour y rester!»
«J’ai sculpté dans du styromousse les moules qui ont servi à fabriquer les murales. Il fallait que je visualise l’œuvre à l’envers car pour obtenir un vide à la fin, je devais sculpter un plein. Lorsque mon moule était prêt, j’allais le porter aux gens de la compagnie Monarch Préco qui eux, à la fin de la journée, y coulaient du béton. Le lendemain matin, la nouvelle section de la murale était sortie du moule et mise en place, tandis que moi je devais fournir un autre moule à la compagnie pour qu’une autre section soit coulée ce jour-là. Évidemment, nous devions parfois travailler sous la pluie car le temps pressait.» Détail intéressant: pour réaliser ses énormes moules de styromousse, l’artiste a loué un plancher de l’ancienne usine de la compagnie Cadbury, sur l’avenue de Lorimier. Si seulement il avait utilisé du chocolat au lieu du béton!
Les automates du métro
Les murales de Jacques Huet ont pour titre Réveil de la conscience dans la solitude. Sur la plaque installée près de l’œuvre, il est écrit: «Deux personnes, côte à côte mais pourtant solitaires, sont à la recherche de leur entité. L’œuvre témoigne d’un cheminement dans la solitude pour retrouver la vraie racine, le vrai visage, enfouis sous le masque de l’automate.» Ce thème a été développé par l’artiste durant ses voyages dans le métro. «J’ai remarqué que dans le métro, personne ne se parle, personne n’ose se toucher. Parfois, quand on touche à quelqu’un sans le faire exprès, cette personne saute quasiment en l’air! C’est pour cela que les personnages sur mes murales ont une allure d’automate. Quant au personnage de la sculpture modulaire, il est en trois dimensions, contrairement aux autres personnages qui sont en deux dimensions.» Lorsqu’on lui demande si ce personnage différent des autres représente l’enfant qui naît et qui n’a pas encore été influencé par le conformisme de la société, Jacques Huet évite de se prononcer. «À chacun d’interpréter mon œuvre comme il le désire!»